Postulat — Contre une future coulée grise: créons des espaces verts et frais aux abords du tram

Déposé par Séverine Graff, conseillère communale – Postulat du 27 février 2024

Après la récente décision d’approbation des plans (DAP), les travaux de construction du tramway lausannois sont entrés dans leur dernière phase et les Lausannois·ses peuvent ainsi se réjouir d’une entrée en fonction du tram en 2026. Le gros œuvre étant désormais sur les rails, ce postulat se propose de travailler sur le qualitatif des aménagements qui sont de compétences communales. Naturellement, le lancement des travaux a engendré l’abattage d’une centaine d’arbres dans le quartier de Sébeillon-Malley. Lors leur coupe en novembre 2021 s’étalait sur la Rue de Genève un tag au sol dessinant des arbres et annonçant un « j’arrive bientôt ». Ce message pourrait s’avérer un peu optimiste. En effet, le guichet cartographique lausannois annonce en 2024 que sur les 93 arbres abattus sur le bas de la rue de Genève et sur le bas de la rue de Morges, seule une quarantaine sera compensée.

Le tram traversera le quartier de Sébeillon-Malley où la population a l’un des statuts socioéconomiques le plus défavorisé de la ville[1], et dont les habitant·es ont essuyé durant des années le long chantier du tram. De nombreux immeubles en bas de la rue de Genève et en bas de la rue de Morges sont des logements où l’isolation thermique et phonique n’est pas bonne. Par ailleurs, le revêtement du tram sur le territoire lausannois sera uniquement en béton (hormis la gare de Prélaz les Roses dont le sol sera végétalisé). Il est donc légitime de craindre que la rue de Genève et le bas de l’avenue de Morges ne soient encore plus mal protégés contre les îlots de chaleur et contre les inondations provenant de la colline de Valency qu’avant les travaux.

Pourtant, la Ville a adopté un ambitieux plan Canopée dont la plaquette au public explique sa Stratégie d’arborisation : « Les lieux fortement minéralisés sont aussi ceux qui tirent le plus grand bénéfice de l’arborisation. Il importe par conséquent d’intégrer systématiquement l’arborisation dans tous les projets touchant à l’espace public (requalification de rues et places, réfection des revêtements, renouvellement de réseaux, etc.) »[2]. On peut donc s’étonner qu’un vaste chantier débouche sur un appauvrissement de la végétalisation dans ces rues déjà très minérales.

Une enquête de la RTS en 2022 montrait déjà que dans les villes suisses, le taux de couverture de canopée dans les quartiers était proportionnel au pouvoir économique de ses habitant·es[3]. Il faut globalement lutter pour que l’arborisation ne soit plus un privilège réservé aux rues aisées, et spécifiquement investir pour que l’axe du tram dans le quartier de Sébeillon-Malley ne devienne pas une « coulée grise » invivable, miroir inversé de la « coulée verte » sous gare.

Pour ce faire, nous avons l’honneur de demander à la Municipalité d’étudier l’opportunité de :

  • Compenser tous les arbres coupés et replanter 50% supplémentaires dans les abords directs du tram, en accord avec la Stratégie d’arborisation de la Ville de Lausanne. Lorsque la plantation est rendue impossible par les impératifs souterrains, les arbres devraient être plantés dans les rues adjacentes.
  • Lors que le plantage d’arbre entre en conflit avec les conduites et les câbles souterrains sur l’axe du tram, poser a minima des bacs de culture ou des points d’eau pour permettre aux habitants de se rafraîchir en été.
  • Investir le réseau privé à proximité du tram et établir des conventions avec les propriétaires privés pour leur offrir des arbres à planter sur leurs parcelles.

[1] Radoslaw Panczak, “The Swiss neighbourhood index of socioeconomic position: update and re-validation”, Swiss Med Weekly, n°153, 2023

[2] Plaquette « Objectif Canopée » SPADOM, 2021.

[3] « Les arbres en ville sont-ils un privilège de riches ? », 19h30, avril 2022