Tribune – La crise, la Ville et les espaces publics

Tribune de Florence Germond parue dans l’édition du 4 janvier du 24heures

L’espace public est au cœur des liens que nous tissons. Flâner dans les rues, s’arrêter pour partager un repas sur le pouce avec une amie ou se promener le dimanche au bord du lac serait impossible sans l’espace public.

Or l’arrivée brutale du coronavirus a bouleversé notre rapport à l’espace public. En même temps, cette crise agit comme un puissant révélateur de son importance: l’espace public est notre bien commun, à toutes et tous. Avec les mesures de distanciations sociales, indispensables, nous courrions le risque de la disparition de ce lieu de rencontre et d’interaction.

Pour éviter de tels désagréments, la Ville de Lausanne a pris, dans l’urgence, des mesures là où elle le pouvait. Avec des mesures comme l’ouverture de la rue Centrale pour le marché, la piétonnisation du quartier emblématique de la Cité et des quais d’Ouchy le week-end, nous voulions redonner de l’espace aux habitants comme aux visiteurs. Et sans surprise, la population s’est immédiatement réapproprié ces nouveaux espaces. A posteriori, on se dit que l’envie était déjà là avant le corona.

La création de 200 (!) nouvelles terrasses s’inscrivait dans la même logique. En permettant la convivialité, elle a permis aux restaurants de faire une bonne saison d’été. Sans cette intervention, la situation serait encore plus dramatique aujourd’hui pour les restauratrices et restaurateurs lausannois. Il y avait indéniablement urgence à les soutenir.

La création des bandes cyclables participait elle aussi de la même idée: dans un contexte de crainte de contamination dans les transports publics, la Ville voulait éviter qu’un repli vers les déplacements automobiles n’augmente le bruit et la pollution et ne crée des engorgements. Cela se serait fait précisément au détriment de la convivialité de l’espace public.

Il a été parfois reproché à la Ville d’agir trop rapidement et de ne pas avoir consulté au préalable la population et les commerces. Or, la situation exceptionnelle exigeait une action rapide. Plusieurs acteurs, dont le parlement communal et les associations défendant la mobilité douce, nous pressaient pour une action immédiate. La Ville est donc intervenue très rapidement.

Procédure exceptionnelle

Cette rapidité d’action souhaitée dans le contexte de la crise sanitaire n’a pas permis les consultations habituelles comme nous aimons les conduire, afin de porter les projets à maturité. En contrepartie, de nombreuses adaptations ont été faites a posteriori et en direct, sur le terrain afin de répondre au mieux aux attentes et nous continuerons à en faire là où cela est nécessaire.

Cette situation exceptionnelle nous a une fois de plus montré que l’espace public est un bien partagé entre toutes et tous. Il est inévitablement source de tension car les intérêts divergent concernant son usage. Malgré ces difficultés, nous essayons chaque jour de répondre au mieux aux différentes attentes pour donner plus de vie, de durabilité et d’humanité à notre ville.