Déposé par Mountazar Jaffar, conseiller communale, le 4 novembre 2025.
Demander et échanger autour d’une aide publique – qu’il s’agisse du revenu d’insertion, d’un
logement subventionné, de prestations complémentaires ou de tout autre appui social – est un
acte souvent difficile, parfois chargé de honte, de peur du jugement, et d’un profond sentiment
de vulnérabilité. Cela implique de s’exposer, de partager des éléments intimes de sa vie privée
: ruptures, dettes, violences, maladie ou précarité familiale. Or, dans de nombreux guichets de
l’administration lausannoise, ces échanges se déroulent dans des espaces ouverts, au sein de
halls d’accueil ou de bureaux partagés, sans intimité suffisante, parfois à moins d’un mètre
d’autres usager·ère·s.
Ce manque de confidentialité et de respect des émotions en jeu pose problème à plusieurs
niveaux : les bénéficiaires, souvent gêné·e·s ou en retrait, retiennent ou modifient une partie de
leurs récits, omettent des informations essentielles, ou évitent certaines démarches de peur
d’être exposé·e·s au regard ou à l’écoute d’autrui. Ces situations ont été confirmées lors de
plusieurs échanges informels avec des employé·e·s lausannois·es, notamment dans les services
en charge du logement. Cette configuration physique renforce la perception d’une relation
administrative impersonnelle, distante voire déshumanisante. Il arrive également que certains
services – comme celui de Police – disposent de salles prévues pour recevoir en toute intimité
ou recueillir les plaintes en l’occurrence, mais que par habitude et facilité, elles ne soient pas
ou rarement utilisées.
Ce problème touche directement à la prévention des violences administratives, déjà soulevée
dans d’autres interventions politiques. Car ce n’est pas seulement ce qui se dit qui peut être
perçu comme violent ou stigmatisant, mais aussi le cadre dans lequel cela se dit, lorsqu’il nie
l’intimité, l’écoute et la reconnaissance. Garantir un espace confidentiel n’est pas un luxe, mais
une exigence fondamentale de dignité et une condition d’efficacité : sans cadre protégé,
beaucoup renoncent à faire valoir leurs droits. La Ville de Lausanne, attachée aux principes de
justice sociale et d’égalité d’accès, doit s’assurer que ses guichets respectent cette exigence
d’intimité. Cela implique des aménagements simples, concrets, mais qui peuvent changer
profondément la relation entre administration et population.
Pour ces raisons, le présent postulat demande à la Municipalité d’étudier les mesures suivantes :
1. Réaliser un état des lieux précis de l’aménagement actuel des espaces d’accueil et
d’entretien dans les guichets qui reçoivent régulièrement des habitants et habitantes
(revenu d’insertion, prestations complémentaires, AVS, logement subventionné,
Hôtel et postes de police etc.) afin d’identifier les situations où la confidentialité
n’est pas garantie.
2. Envisager l’installation pilote, puis généralisée, de cabines, de petits espaces fermés
et insonorisés (ou semi-ouverts mais acoustiquement isolés), ou de tout autre
aménagement permettant de garantir aux usager·ère·s un minimum d’intimité dans
leurs échanges avec les services de la Ville, soit de manière systématique, soit à la
demande de l’usager ou de l’agent·e en cas de situation sensible.
13. Estimer les coûts et évaluer la faisabilité technique du point 2.