Déposé par Line Golestani, conseillère communale, le 30 septembre 2025.
La gestion policière des manifestations dans notre ville engage directement le respect des droits fondamentaux et la confiance des citoyennes et citoyens envers les institutions. Les événements survenus à Lausanne le 18 septembre 2025, auxquels j’ai personnellement pris part, soulèvent de graves inquiétudes quant à la proportionnalité des moyens employés par les forces de l’ordre et à la sécurité des personnes présentes.
Ces faits appellent des explications rapides et des garanties de la part de la Municipalité, afin d’éviter que de tels faits ne se reproduisent.
Exposé des faits
Le 18 septembre 2025, une manifestation en faveur de la Palestine s’est tenue à Lausanne. Le rassemblement, de caractère pacifique, a réuni un public diversifié comprenant notamment des personnes âgées, des femmes et des enfants.
Au début du rassemblement, un policier a annoncé au porte-voix depuis l’esplanade surplombant la Riponne que la manifestation était interdite. Le cortège s’est néanmoins mis en marche par la rue Neuve, puis Mauborget, jusqu’à la place Bel-Air où les forces anti-émeutes étaient déployées. Ce dispositif policier tout à fait disproportionné a contraint le cortège à remonter vers la place Saint-Laurent, où il s’est retrouvé bloqué durant plus d’une heure sur les 115 mètres environ séparant les numéros 19 et 37 de la rue St-Laurent. Les cordons de policiers anti-émeutes et leurs fourgons équipés de canon de gaz lacrymogènes étaient en effet placés aux deux extrémités de cette rue piétonne. Ce blocage prolongé, sans possibilité d’avancer ni de reculer, a créé de la confusion et une tension croissante parmi les manifestants pris en étau par la police. Une telle situation comportait un risque de mouvements de foule aux conséquences potentiellement graves. Ce risque s’est encore accru de par l’usage de gaz lacrymogènes par les forces de l’ordre.
Cette intervention apparaît totalement disproportionnée au regard du caractère pacifique de la manifestation. Elle soulève d’autant plus de questions que la manifestation pro-Israël, initialement prévue dans le même périmètre, avait été déplacée à Ouchy, rendant caduc le risque de confrontation entre les deux rassemblements. Dès lors, le déploiement massif de forces anti-émeutes et le recours à la force laissent l’impression d’un traitement différencié entre manifestations selon leur orientation politique, et une criminalisation des manifestants pro-palestiniens, estimés au nombre de 2000 environ.
Il est important de rappeler que, même lorsqu’un rassemblement n’est pas formellement autorisé, les autorités ont le devoir d’assurer la sécurité et l’encadrement des personnes présentes de manière proportionnée et bienveillante.
Dans un communiqué publié le 19 septembre 2025 (Faciliter manifestations et contre-manifestations autant que possible), Amnesty International Suisse rappelle que :
- « Les contre-manifestations pacifiques doivent pouvoir se tenir à portée de vue et d’ouïe de la manifestation qu’elles visent à critiquer » ;
- « Le recours à la force doit toujours répondre aux principes de nécessité et de proportionnalité »
- « Les autorités ne doivent pas donner la priorité à un rassemblement au détriment d’un autre, mais chercher des solutions équitables et transparentes permettant à chacun de faire entendre sa voix » (Anita Goh, responsable thématique à Amnesty Suisse).
Ces principes fondamentaux, loin d’avoir été respectés, semblent avoir été ignorés lors des événements du 18 septembre.
Questions urgentes à la Municipalité
- Pour quelles raisons la manifestation pro-Palestine a-t-elle été bloquée dans la rue Saint-Laurent, malgré l’absence de risque de confrontation suite au déplacement de la manifestation pro-Israël à Ouchy ?
- Quelles justifications la police avance-t-elle pour l’usage de gaz lacrymogènes contre une foule pacifique composée en partie de personnes vulnérables ?
- Quelles mesures la Municipalité compte-t-elle prendre pour que, à l’avenir, l’encadrement des manifestations à Lausanne — autorisées ou non — se fasse dans le respect des principes de proportionnalité, de sécurité des personnes et d’égalité de traitement ?