Postulat – La gestion des taxis doit-elle rester du domaine de l’intercommunal ?

Déposé par Arnaud Thièry et Sébastien Kessler – Postulat du 3 novembre 2020

Le Conseil communal a délégué la gestion des taxis de l’agglomération lausannoise à l’Association de communes de la région lausannoise pour la réglementation du service des taxis. Cette Association de communes regroupe, outre Lausanne, les communes de Pully, Epalinges, Paudex, Le Mont, Crissier, Prilly, Renens, Ecublens, Chavannes-près-Renens, Bussigny-près-Lausanne et Belmont-sur-Lausanne.

Sous l’ancien droit, les communes avaient la compétence de réglementer le service des taxis, notamment en définissant des contingents de taxis des catégories A, B et C pouvant bénéficier de l’appellation, ainsi que de l’usage accru du domaine public, en particulier les places de stationnement ainsi que l’usage des voies de circulation notamment réservées aux bus. Ce système justifiait de réglementer au niveau de l’agglomération le service des taxis, dans la mesure où le nombre de taxis nécessaires à satisfaire les besoins en termes de mobilité devait être géré au niveau intercommunal. Par ailleurs, l’Association de communes a édicté de nombreuses règles concernant le service des taxis, de la couleur des véhicules aux tarifs applicables ainsi que l’obligation pour les taxis A (depuis 2018 appelés « concesionnés ») de s’affilier à un unique diffuseur de courses, lui-même au bénéfice d’une concession intercommunale.

La donne a toutefois changé avec l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2020, de la modification de la loi sur l’exercice des activités économiques (LEAE). En vertu des art. 12a et 62a LEAE, le canton est désormais compétent pour octroyer l’autorisation d’exercer à titre professionnel le transport de voyageurs. C’est aussi le canton qui autorise les diffuseurs de courses. Les Communes ou Associations de communes ne conservent que la compétence de définir les modalités de l’usage accru de leur propre domaine public et de délivrer des autorisations à cet effet, les titulaires des autorisations étant seuls autorisés à s’appeler « taxis ». Toutefois, l’autorisation cantonale est valable pour l’ensemble du Canton et permet à leurs titulaires d’exercer sur tout le territoire cantonal, même si les communes demeurent libres de contingenter le nombre de « taxis » disposant de l’usage accru du domaine public. Cela signifie donc que, outre les VTC, de très nombreux taxis,au bénéfice d’une autorisation communale exogène aux communes membres de l’Association intercommunale pour les taxis, peuvent exercer dans le périmètre local, ce qu’ils font déjà depuis de nombreuses années par ailleurs.

Dans ces conditions, la pertinence de déléguer la gestion du service des taxis est nettement moins évidente que sous l’ancien régime. En effet, le nombre d’autorisations de circuler dépend du canton, et les communes peuvent attribuer uniquement certaines autorisations d’usage du sol. Le présent postulat entend questionner l’opportunité de maintenir la délégation au niveau intercommunal de la compétence cantonale, alors que Lausanne pourrait peut-être utilement reprendre la compétence de gérer les autorisations d’usage accru de son domaine public. En outre, la délégation à l’Association intercommunale ôte au Conseil communal de Lausanne la compétence de se prononcer sur les défis qui attendent la profession, confrontée depuis des années à l’arrivée massive de nouveaux acteurs sur le marché et fragilisée depuis cette année par la crise économique qui suit la crise sanitaire.

La reprise de la compétence par le Conseil communal présenterait aussi un intérêt sous l’angle de la représentativité, l’Union des communes vaudoises reconnaissant d’ailleurs que « la représentativité par délégation produit un déficit démocratique dans le fonctionnement du service public. »[1]

Ainsi, étant donné ces nouvelles circonstances, il serait utile de réévaluer la pertinence de la structure administrative et des coûts actuels du dispositif de l’Association, devenus largement sur-dimensionnés, tout en précisant que la part dévolue au contrôle de policiers spécialisés sur le terrain lausannois doit en tous les cas être maintenu.

Dans la mesure où un retrait de l’Association intercommunale ne serait possible qu’avec un préavis d’un an pour la fin d’une législature (art. 18 des statuts), et qu’elle aurait des implications importantes, le présent postulat invite la Municipalité à présenter au Conseil communal, sans doute dans le courant de la prochaine législature, un rapport sur les avantages et inconvénients pour Lausanne de continuer à déléguer la gestion du service des taxis à l’Association de communes.

Conclusions :

Le présent postulat invite la Municipalité à étudier l’opportunité de présenter au Conseil communal un rapport sur les avantages et les inconvénients d’une sortie de Lausanne de l’Association de communes de la région lausannoise pour la réglementation du service des taxis.

Pour le groupe socialiste :

Arnaud Thièry et Sébastien Kessler

[1] Union des communes vaudoises, Aide-mémoire : « La collaboration intercommunale : mode d’emploi », p. 11 (disponible sur https://www.ucv.ch/fileadmin/documents/pdf/Th%C3%A8mes/05-Institutions-publiques/Intercommunal/Collaboration_intercommunale_-_mode_d_emploi_-_08.2016.pdf).