Interpellation – Le CHUV doit rester un service de l’Etat pour relever les défis de santé publique

Jean Tschopp, député – interpellation déposée au Grand Conseil le 28 août 2018

Présentée comme une mesure de «bonne gouvernance», une autonomisation du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) aurait plusieurs répercussions redoutables sur l’accès aux soins des patients, le personnel hospitalier, les investissements consentis pour relever les nouveaux défis de santé publique ou encore pour la recherche. Dans le canton de Vaud, le CHUV a la particularité d’être un service de l’Etat. Il est sain de s’interroger sur les opportunités offertes par cette situation particulière pour le développement de soins répondant aux besoins de la population. Le rapport sur la politique de santé publique 2018-2022 et le plan stratégique du CHUV 2019-2023 présentés le 05.07.2018 éclairent les moyens mis en place pour répondre aux nouveaux défis de santé publique. Les champs d’action principaux font clairement ressortir l’accès à des prestations de soins de qualité, universels et adaptés, incluant les personnes vulnérables en situation de santé particulière. Le nouveau plan stratégique fait apparaître de nouvelles priorités, parmi lesquelles :

  • la mise en œuvre d’un centre de compétences en matière de médecine génomique et la prise en charge des patients atteints de maladie génétique ;
  • les maladies infectieuses (2e cause de mortalité au monde), considérant l’émergence de nouvelles pathologies infectieuses, de changements climatiques et de phénomènes migratoires qui favorisent la survenue de maladies infectieuses ;
  • les neurosciences visant à soigner les personnes touchées par une affection de leur système nerveux (une personne sur quatre en Europe, actuellement) avec la création d’un centre de compétence en neuroréhabilitation et l’émergence de neuro-technologies ;
  • ou encore, l’immunologie avec la détermination de l’efficacité et de la sécurité des traitements biologiques et le développement de plateformes technologiques.

    Par ailleurs, le développement de l’oncologie qui s’est accéléré ces dernières années dans la prise en charge clinique des patients et la mise en place de structures de recherche translationnelles va s’intensifier. Cette politique de santé publique ambitieuse est rendue possible par des investissements publics à la hauteur des enjeux et par un développement des infrastructures hospitalières (Hôpital Riviera-Chablais, Hôpital des Enfants, Cery, Agora, nouveaux blocs opératoires) répondant à l’évolution démographique et de la médecine.

Une autonomisation du CHUV questionne cette politique ambitieuse de maintien en santé de la population vaudoise et d’accessibilité de tous à un système de soins efficace et socialement supportable. La redéfinition de nouvelles lignes stratégiques par un Conseil d’administration du CHUV pourrait entrer en conflit avec cette approche garantissant un accès étendu aux soins. Par ailleurs, la question des coûts induits par le fonctionnement et la rémunération d’un Conseil d’administration ne doit pas être minimisée, sans parler de leurs répercussions possibles sur une réduction du personnel soignant. À titre de comparaison, le Conseil d’administration des Hôpitaux Universitaires Genevois (HUG) est composé de 20 membres. Enfin, les freins aux investissements décidés par un Conseil d’administration pourraient mettre à mal les moyens consentis pour répondre aux défis de santé publique actuels et à venir.

Attachés à un accès à des soins de qualité aussi large et étendu que possible et à une politique de santé publique ambitieuse, les députés signataires adressent les questions suivantes au Conseil d’Etat et le remercie d’ores et déjà pour ses réponses :

  1. Quels sont les risques d’une autonomisation du CHUV en termes de perte de contrôle politique (contrôle démocratique) ?
  2. Quels pourraient être les répercussions de cette autonomisation sur les orientations stratégiques du CHUV : priorisations des enjeux de santé publique, investissements, développement des infrastructures et recherche ?
  3. Quels sont les effets prévisibles d’une autonomisation du CHUV sur l’accès aux soins ?
  4. Quels sont les effets prévisibles d’une autonomisation du CHUV sur le personnel (conditions de travail, salaires, caisse de pension de l’Etat de Vaud, etc) ?
  5. Quelle estimation le Conseil d’Etat fait-il des coûts induits par une autonomisation du CHUV ?
  6. Quel bilan tirent les autres cantons suisses qui ont connu une autonomisation de leur centre hospitalier ?
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